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Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

SUR LA GREVE GENERALE

 

La « Grève générale », mot magique qui a lui seul vaut toutes les déclarations, tous les programmes, qui ouvre les espoirs vers un monde nouveau, qui a le pouvoir (si j’ose dire) d’électriser les esprits et doit mobiliser les « masses exploitées ». Mot magique qui hante les rêves des révolutionnaires depuis deux cent ans. Grève générale... toujours annoncée, jamais réalisée ou tout au moins jamais porteuse des espoirs qui sont placées en elle. Grève générale OK,... mais, au fait, pour quoi faire ?

La grève, « arrêt collectif du travail » a été tout naturellement l’arme des prolétaires au 19e siècle, pour exprimer leur mécontentement. Arme particulièrement efficace, entre les mains des salariés, dans un contexte de développement et de constitution en Europe, et en Amérique, de puissances industrielles qui avaient absolument besoin de la force de travail locale en quantité, pour bâtir leurs empires industriels. La grève était tout naturellement l’expression à la fois du caractère indispensable de la force de travail... incarnée par la classe ouvrière et l’expression du rapport de force qu’elle était capable de créer. Elle était également l’expression de la solidarité... ce que l’on appelait la « conscience de classe ».

La « grève générale », et à fortiori « insurrectionnelle » était le cran au dessus de la grève. Il y a dans la « grève générale » une dimension politico-sociale, un projet politique d’en finir avec le système d’exploitation, avec le vieux monde, une ouverture vers un nouveau monde plus juste. Pourtant, la grève générale n’a pas de sens en soi, elle n’en a qu’au regard du projet qu’elle véhicule.

UNE VISION MYTHIQUE DE LA LUTTE

La grève a pour objectif de bloquer la production pour contraindre le chef d’entreprise à céder aux revendications formulées par les salariés. Ces derniers font l’hypothèse, d’ailleurs fondée, que le patron a plus intérêt à céder aux revendications qu’à courir le risque de perdre beaucoup en ayant son entreprise bloquée.

La grève générale ajoute une autre dimension à l’action. Touchant, en principe, tous les secteurs d’activité, elle remet en question la cohésion et la stabilité de l’ensemble du système et pose par là même la question du pouvoir politique. Elle évoque incontestablement la puissance politique et le pouvoir de changer les rapports sociaux.

Cette puissance évoquée par la grève générale a donné une vision plus ou moins messianique à l’évènement. Vision qui a hanté des générations de militants qui ont appelé de leurs vœux la réalisation de ce moment de rupture qui devait faire basculer l’ancien monde dans les poubelles de l’Histoire et présider à l’avènement du nouveau.

Pourtant, malgré les multiples exemples, à toutes les époques et sur tous les continents la grève générale n’a jamais mené au « nouveau monde », tout juste a-t-elle relancé les espoirs que l’on mettait en elle avant de céder la place au désenchantement et à la frustration. Il manquait toujours « quelque chose » pour que ça réussisse mais on n’a jamais pu se mettre d’accord sur « ce qui manquait ».

LA GREVE GENERALE : QUOI AVANT ? QUOI APRES ?

La grève générale est un moment de l’Histoire, mais de quel moment s’agit-il ? Est-ce l’aboutissement de mobilisations partielles sectorielles, d’une lente prise de conscience ? Est-elle décidée par une instance politique ou est ce un mouvement spontané qui la déclenche ?

Quel objectif a la grève générale ? Est-il clairement exprimé au moment de son déclenchement ? Par qui ? Et quel moyens se donne-t-on pour assurer un « après » à ce grand moment ? La grève générale est-elle l’aboutissement concret d’une prise de conscience collective ou est-ce l’inverse, que c’est au cours de cette grève que se forge cette conscience ?

Peut-on imaginer que, suite à une grève générale, qui peut être déclenchée de multiples façons et pour de multiples raisons, s’enclenche une dynamique de changement social changeant les rapports de production et donc les rapports sociaux ? En théorie on peut certes l’imaginer, ainsi que du fait du manque d’expérience, mais aujourd’hui que l’on peut tirer le bilan de deux siècles de luttes dans le système marchand et à peu prés sur tous les continents, on peut difficilement croire en un tel scénario.

Il ne faut donc pas se laisser impressionner par le potentiel de puissance de la grève générale et la replacer dans un contexte politique et social.

Si la grève générale doit ouvrir sur le changement social, il faut que ce changement soit préparé en amont, pas (seulement ?) de manière théorique par des théoriciens, mais très concrètement par la mise en place d’une « structure sociale alternative » prélude aux nouveaux rapports sociaux que l’on veut instaurer (voir l’article « DUALITE SOCIALE/DUALITE DE POUVOIR »). C’est cette structure qui constitue le socle, les fondements du changement et la garantie que la grève générale (si elle est déclenchée) aura un « après ». En effet, il est possible, en raison des conditions historiques du moment et du lieu, que la puissance de cette structure alternative suffise, sans pour cela tout bloquer pour déclencher un basculement du système. Cela dit, c’est vrai que la grève générale peut être un extraordinaire accélérateur de l’Histoire, mais attention, accélérateur, elle n’en est pas le moteur.

LES CONDITIONS NOUVELLES IMPOSEES PAR LA MONDIALISATION

La mondialisation marchande impose aujourd’hui des contraintes et des conditions que l’on ne saurait ignorer et qui relativisent singulièrement la vision que l’on pouvait avoir de la grève générale.

A l’époque ou les Etats-nation structuraient l’essentiel de la production mondiale et dominaient politiquement le monde tout évènement qui bouleversait l’un d’entre eux avait des répercussions considérables sur les autres. Ceci tenait au fait que ces Etats étaient peu nombreux, détenaient la technologie, les compétences et dominaient l’ensemble du reste du monde. On pouvait alors imaginer, et l’on ne s’en est pas privé, que la « mise à feu » dans un des pays pouvait embraser l’ensemble d’un continent. Un Etat-nation produisait à l’époque à peu prés tout ce dont il avait besoin, il constituait une sorte d’unité autonome sur le plan économique. Ce n’est plus le cas aujourd’hui... aucun pays est autosuffisant par rapport à l’ensemble de ses besoins. Déclencher donc une grève générale n’a donc plus le même sens, les mêmes conséquences et risque d’aboutir, ce qui a été souvent le cas, à une simple alternative électorale qui ne règle rien.

C’est donc à une véritable stratégie alternative à l’échelle internationale que nous devons nous atteler. Il faut d’abord penser l’alternative, la penser par delà les frontières et inventer, concevoir des réseaux de coopération et de solidarité à une autre échelle que celle que nous permettent les organisations et structures nationales.(voir ). Il nous faut éviter (ce sera dur) de penser le changement en terme de pouvoir politique strict, mais d’abord et surtout en terme d’alternative économique et sociale.

La grève générale qui demeure dans bien des esprits la clef magique pour tout changement est à prendre avec circonspection. Sans pour cela être reléguée au musée des antiquités historiques elle a besoin d’un sérieux réexamen de son contenu et d’une réactualisation des conditions de son déclenchement et des possibilités qu’elle offre. Evitons de confondre le moyen avec l’objectif.

24 novembre 2004

Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

L'ECHANGE MARCHAND EST-IL EQUITABLE ?

 

Question fondamentale qui nous interroge sur le «sens» du rapport social qui fonde notre société, mais aussi question essentielle qui détermine le «ce vers quoi» nous allons ou voulons aller. L’échange marchand est-il indépassable comme nous le dit la «pensée unique». Estil ce que l’on fait de mieux en matière de relations humaines? En un mot est-il «juste»?

A la question de l’équité de l’échange marchand, on peut répondre, formellement oui, et socialement non. En effet, le rapport d’équivalence en valeur fait que dans l’échange, même et surtout par l’intermédiaire de la monnaie, une quantité de valeur s’échange contre une même quantité de valeur. Il y a donc formellement équité. Or cette équité apparente ne se retrouve pas dans ce qu’est et devient la société qui est fondée sur ce principe. Pourquoi?


SUR LA NATURE DU RAPPORT D’EQUIVALENCE


Le rapport d’équivalence, c’est le rapport qui fait que dans l’échange, aucune des deux parties n’est lésée, autrement dit, en terme de valeur, il est dit équitable, quand les marchandises qui s’échangent sont, en valeur, identiques. La réalité est cependant un peu plus compliquée. En effet, la mesure de la valeur n’est pas évidente et jamais on n’a trouvé l’instrument parfait et incontestable de cette mesure. De plus la réalité sociale ne se résume pas à un simple échange de marchandises entre personnes les possédant.

«Qu’est ce qui fait qu’une marchandise vaut…»? On peut certes répondre: «Parce que sa fabrication coûte». Soit, mais «Qu’est ce que coûter?» … sinon valoir quelque chose … Ce qui renvoie à la première question. On ne peut pas sérieusement expliquer l’origine de la valeur d’une chose en se référent à la valeur d’une autre… ce serait en fait «tourner en rond».

Il faut donc trouver la seule chose qui soit commune à toutes les marchandises et qui puisse se mesurer… celle-ci est, ne peut-être que le travail humain puisque toute production en est le produit. Mais alors se pose le problème de: «Qu’est ce que le travail humain et surtout peut-on et comment le mesurer?».

Le travail humain n’est pas facile à déterminer. En principe, théoriquement c’est facile mais concrètement? En effet le travail humain est multiple, non homogène, évolutif. Quant à sa mesure, ça ne peut être que le temps. Autrement dit la valeur serait déterminée par la quantité de travail nécessaire à la production. Donc l’échange serait équitable dans le cas d’un échange entre deux marchandises nécessitant le même temps de travail. Encore faut-il que l’on veuille, ou que l’on puisse, échanger marchandise contre marchandise… ce qui n’est pas généralement le cas. C’est la monnaie qui permet de dépasser cet obstacle.


SUR LE RÔLE DE LA MONNAIE


Pour qu’il y ai échange il faut qu’il y ai de quoi échanger. Pour obtenir un pain encore faut-il que je donne en échange au boulanger une marchandise de valeur équivalente et que, bien entendu, le boulanger l’accepte, en ai besoin. En l’absence de la monnaie, l’échange serait très limité, voire souvent aléatoire.

La monnaie joue donc non seulement le rôle d’intermédiaire dans l’échange, évitant le recours à un troc problématique, mais aussi de réserve de valeur, permettant ainsi à son possesseur de pouvoir s’acheter ce que bon lui semble, quand bon lui semble. Mais où trouver de la monnaie?

On peut l’acquérir en vendant ce que l’on a produit, auprès de l’acheteur, et donc en disposer pour ses achats. C’est le schéma le plus simple. Cela dit, tout le monde n’est pas directement producteur et vendeur de marchandise et l’évolution du système marchand éloigne de plus en plus de ce cas de figure. Le schéma le plus courant, et généralisé, dans le système marchand est de travailler dans une entreprise (au sens large) et de toucher en fin de mois un salaire autrement dit d’avoir un emploi… ce qui n’est pas une garantie absolue. La monnaie n’est donc pas un simple instrument d’échange, économiquement et socialement neutre… mais il y a pire.

La monnaie, du fait du simple dépassement de son rôle dans l’échange et de son rôle de réserve de valeur a peu à peu acquis une sorte d’autonomie au point de donner naissance à ce que l’on appelle une «économie financière» et dans laquelle la monnaie ne sert pas d’instrument d’échange de biens et services mais d’instrument afin d’obtenir encore plus de monnaie, à partir de la monnaie… le summum de ce processus étant la spéculation monétaire.

Ainsi, la monnaie qui, apparemment, devait servir d’instrument dans l’échange et garantir la fiabilité et la facilité de celui-ci, non seulement, dans le cadre du rapport marchand, ne garantie aucune équité sociale dans l’acquisition des biens et services en vue de la satisfaction des besoins, mais devient objet de spéculation. Elle est devenue une des expressions du rapport social marchand et le symbole de son caractère inégalitaire.


LE CAS TRES PARTICULIER, ET TROUBLANT, DU RAPPORT SALARIAL


Le salaire est une quantité de monnaie qui permet à son possesseur, le salarié, de vivre en achetant des marchandises produites par d’autres. On sait - voir l’article «LE TRAVAIL EN QUESTION (3) - Le salaire rémunère-t-il le travail?» - que le salaire ne rémunère pas le travail effectué mais ne correspond en fait qu’à la «quantité de valeur nécessaire au salarié pour se reproduire en tant que producteur». Mais si le salaire est bien le moyen de vie du salarié, il est aussi un coût pour le producteur et entre de ce fait dans le coût de la marchandise. Or au niveau du marché, le consommateur sélectionne la marchandise par son prix c’est le producteur qui vendra le moins cher (à qualité égale) qui vendra. D’où une tendance générale des producteurs à réduire leurs coûts et en particulier la masse des salaires. Ceci ils peuvent le faire grâce à l’utilisation du progrès technique qui accroît la productivité du travail permettant ainsi de réduire le nombre de salariés.

L’existence du salaire n’est donc pas un droit, un acquis automatique pour le salarié. Le salaire est acquis sous condition du besoin de son travail par le chef d’entreprise, ce qui explique le chômage et l’exclusion.

Ainsi donc, si le salarié voit payé, «à sa juste valeur» sa capacité de travail, toute la valeur qu’il crée par son travail ne lui est pas payée. Pourtant l’échange salarial (salaire en échange de la force de travail) est, au niveau du principe équitable: en effet ce qu’achète le chef d’entreprise ce n’est pas le travail, mais la capacité de travail, la force de travail, qui crée plus de valeur qu’elle n’en a besoin pour se reproduire, et même s’il la paie à sa valeur la différence entre la valeur produite (moins les matière premières et l’amortissement du capital) et le salaire versé va dans la poche des propriétaires du capital. Le rapport marchand salarial est donc formellement juste, mais socialement injuste.

L’expression: «Tout travail mérite salaire» est apparemment juste, mais en fait source d’une incontestable inégalité et injustice.


Ce qui fait l’iniquité dans le rapport marchand ce n’est pas, contrairement aux apparences, le fait que l’on paie la marchandise trop chère par rapport à sa valeur, quoique cela puisse jouer. La concurrence entre unités de production fait d’ailleurs en sorte que cette dérive soit limitée… elles ont en effet tout intérêt à vendre au prix le plus bas possible pour garder et même gagner de nouveaux consommateurs.

Ce qui fait l’iniquité c’est le fait que la capacité de travail soit une marchandise et cette iniquité est en fait double:
- le salaire ne rémunère pas le travail, mais la valeur de la capacité de travail, en ce sens il y a une appropriation privée et non contrôlée par l’intéressé de la valeur qu’il produit (la différence est évidemment le profit),

- l’organisation sociale qui institutionnalise le rapport marchand fait que le salaire apparaît et est considérée comme la rémunération du travail, ce est faux et mystifie totalement le rapport.

Ce qui justifie finalement le versement du salaire ce n’est pas l’attitude éthique du paiement du travail de celle ou celui qui travaille, mais le fait qu’il puisse demeurer une force de production de valeur et qu’il puisse faire en sorte qu’en achetant, il permette au producteur de recouvrir ses frais et réaliser le profit… c’est tellement vrai que lorsqu’on n’a plus besoin du salarié, on le licencie.

Ceci explique ce qui a été dit au début: le rapport marchand est formellement équitable, mais ne l’est pas socialement.

Patrick MIGNARD

13 Novembre 2004

 

Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

AUX LIMITES DU SYSTEME MARCHAND

Tout système dans l’Histoire a atteint un jour ou l’autre ses limites et a cédait la place à un autre système, à une autre organisation de la société, basées sur d’autres valeurs. De même que tout système dans l’Histoire a cru qu’il était l’aboutissement ultime de l’évolution sociale, notre système tombe dans le même travers et veut nous faire croire que l’Histoire est finie. Il faut replacer le système marchand à sa « juste place » dans l’Histoire.

Ne nous méprenons pas, malgré les discours lénifiants et les entrechats médiatico politiques, le système marchand a de moins en moins de marges de manœuvres pour limiter les conséquences de l’application de ses règles de fonctionnement… lui aussi tend inéluctablement vers ses limites. Les problèmes économiques s’accompagnent aujourd’hui d’une véritable décomposition sociale, d’une perte de confiance dans ce qui constitue sinon les valeurs, du moins les conditions d’expression de celles-ci dans notre société.

À moins de croire en la fatalité ou au hasard, ou en une volonté divine, ce qui revient à peu prés au même, le secret de la compréhension de l’évolution historique, du sens de l’Histoire diraient certains, réside très probablement dans la compréhension des mécanismes à la fois unificateurs et contradictoires qui sont à la base des sociétés. La démarche de cette connaissance n’est pas simple car, contrairement à la science physique, on n’a pas affaire à une science exacte et l’on ne peut pas établir des lois à vocation spatio-temporellement universelles.

DE L’EXPLOITATION DE LA FORCE DE TRAVAIL À L’EXCLUSION SOCIALE

Il n’y a pas de linéarité dans le développement des contradictions du système marchand. Ceci signifie que l’hypothèse faite au 19e siècle d’un développement et une aggravation toujours plus importante de l’exploitation salariale touchant un nombre de plus en plus grand d’individus, ne s’est pas réalisée conformément à la prédiction. En effet, s’il y a bien eu « généralisation du salariat »… et le processus se poursuit, et même dans des secteurs où on l’attendait le moins (professions libérales, travail social,…), les conditions de la valorisation du capital (accroissement de la rentabilité, réduction des coûts) a entraîné un phénomène conjoncturel qui est devenu structurel : le sous emploi. La croyance en un besoin toujours plus important, voire illimité, de force de travail s’est avérée fausse. Ainsi, ce qui a constitué pendant des décennies la contradiction principale du système : l’exploitation salariée, a cédé le pas (sans pour cela disparaître) à une condition beaucoup plus destructrice pour le système : l’exclusion. L’accroissement de l’exploitation d’une partie toujours plus importante de la population, la classe ouvrière, n’a jamais été, même à ses pires moments la contradiction qui a mis en péril l’ensemble du système.

Le développement de l’économie de marché dans les pays industriellement développés, qui constituaient l’essentiel de l’organisation et de la direction de la production jusqu’après la 2e Guerre Mondiale a pu malgré les conflits qu’il engendrait, sinon intégrer organiquement la classe salariée du moins s’« acheter la paix sociale » : augmentation du niveau de vie, protection sociale, retraites,…. Le quasi monopole de la production mondiale dans ces pays, la possession de la technologie et la domination économique et politique à l’échelle du monde (les empires coloniaux), ont permis, à l’époque, des prouesses en matière de politiques économiques qu’il ne leur est plus possible aujourd’hui d’accomplir. Les conditions imposées par la mondialisation marchande (mondialisation des marchés, y compris celui de la force de travail) ont imposé, et imposent, des conditions qui non seulement remettent en question les acquis sociaux, mais démantèlent de nombreux secteurs de l’activité économique. Licenciements massifs et délocalisations en sont les manifestations les plus spectaculaires. Non seulement on peut produire plus avec moins de force de travail, mais encore on peut trouver une force de travail moins chère que dans les pays développés… ce qui entraîne une relativisation du travail humain dans la production, et donc, structurellement une exclusion.

L’exclusion, qui est une conséquence directe du développement du salariat, est en passe de devenir le point nodal des contradictions du système marchand. Pourquoi est-elle particulièrement destructrice ? L’intégration dans le système, même si elle s’est faite, et se fait, en instrumentalisant l’individu (j’ai besoin de lui je le prend, je n’en ai plus besoin, je le vire…), lui donne tout de même une « place », une « identité sociale », un « sentiment d’être utile », de « servir à quelque chose ». C’est ce phénomène d’intégration qui a permis au système d’intégrer la « classe ouvrière », d’en faire sinon un allié du moins une classe sociale qui a su limiter ses revendications dans le cadre du « supportable » pour le système (voir l’évolution des syndicats). En effet, l’identité sociale du salarié n’est pas un vain mot. Il est conscient, et à juste titre, d’être un élément essentiel de la société. C’est cette situation qui fera sa force : la conscience de classe, le désir et le besoin de s’organiser, la possibilité d’établir un rapport de force pour améliorer sa situation… on parlera même de « culture de classe ».

La montée en puissance de l’exclusion détruit ce « consensus » sur lequel a fonctionné économiquement, politiquement et même idéologiquement le système marchand. Or, le système marchand ne sait pas résoudre ce problème. Il ne le peut d’ailleurs pas et s’il s’y risquait, il remettrait en question ses propres principes de fonctionnement… ce qui explique que l’Etat ne pose jamais le vrai problème.

DE L’EXPLOITATION DES RESSOURCES NATURELLES AU SACCAGE DE L’ENVIRONNEMENT

L’exploitation, par le système marchand des ressources naturelles a pu paraître logique et « naturelle » comme elle l’était apparue aux autres époques de l’Histoire… encore que. Même, au moment de la révolution industrielle au 19e siècle, il n’est pas encore évident qu’à terme, une telle logique de développement, accompagné d’un perfectionnement sans précédent des technologies, posera de sérieux problèmes. Il faudra attendre véritablement l’après deuxième guerre mondiale, et même la fin des années soixante pour que les sonnettes d’alarme commencent à être actionnées.

Aujourd’hui, la démonstration n’est plus à faire. Les clignotants sont au rouge dans tous les secteurs de l’environnement. Le diagnostic a été fait et il est de notoriété publique que c’est notre mode de production qui est à l’origine de telles catastrophes (nucléaires, chimiques, climatiques et autres). La course effrénée à la production (toujours plus de croissance voir l’article « LA CROISSANCE ? QUELLE CROISSANCE ? »), l’incitation délirante à la consommation (voir l’article « LA PUB OU LA VIE »(, les gaspillages inouïes des réserves naturelles ne sont que les manifestations du système marchand qui opère désormais à l’échelle mondiale et avec des moyens techniques sans commune mesure avec ceux utilisés aux autres époques de l’Histoire. Des conférences se sont tenues, des traités élaborés, une multitudes de rapports écrits et diffusés… pourtant rien ne change et ce pour une raison fort simple : poser le vrai problème et esquisser des solutions ne peut se faire (comme dans le cas précédent du travail et de l’exclusion) qu’en remettant en cause les principes de notre fonctionnement… ce qui est tout à fait exclu. Pire, alors que nous avons été une minorité (l’Europe et les USA au 19e et 20e siècle) à détruire l’environnement, le seul modèle de développement que nous proposons aux autres pays (via le FMI et l’OMC) est un modèle identique au notre ( ???). La seule concession que l’on fait pour ce problème est d’ordre purement idéologique en inventant le « développement durable », véritable escroquerie politique qui permet de se dédouaner à bon compte et à continuer à détruire l’environnement mais avec la bonne conscience de celui qui a tenté « quelque chose », (voir l’article « LA DECROISSANCE ? QUELLE DECROISSANCE ? »)

Toutes les conférences sur l’environnement sont des échecs… ce qui n’est pas un hasard. Les Etats, quels qu’ils soient, garants du système marchand, ne peuvent évidement pas remettre en question ce dont ils sont les garants

UNE PERTE DE CONFIANCE GÉNÉRALISÉE

L’illusion, ou plutôt les illusions, qui étaient celles des économistes, idéologues et autres chantres de l’économie de marché jusqu’aux années 1950 (le « rêve américain »), sont entrain de s’effondrer. Le système marchand est en passe d’atteindre ses limites. Si l’illusion subsiste encore c’est grâce à un effort inouï de « communication », de conditionnement de masse. Les Etats n’expliquent plus, ils « communiquent », autrement dit donnent l’apparence de la maîtrise alors qu’ils ne l’ont plus : voir les discours totalement creux des politiques… de droite comme de gauche.

Les contradictions ont atteint un tel niveau aujourd’hui et l’incapacité et/ou complicité des Etats sont telles que la suspicion citoyenne à leur égard est entrain de se généraliser… il n’est qu’à voir le désintérêt que suscite la question politique auprès d’un nombre de plus en plus important de citoyens.

La situation a atteint un tel degré de dégradation que toute parole officielle est aujourd’hui suspecte. Qui peut croire en un rapport officiel, en des chiffres officiels, en une déclaration officielle ? Ceci est tellement vrai que lorsqu’on veut savoir la vérité sur un évènement on fait appel, pour enquête et investigation à un « organisme indépendant »…sous entendu « de l’Etat »,… ce qui est le comble dans ce que l’on appelle une démocratie. Une telle situation remet en question la notion même de citoyenneté qui est, excusez du peu, le fondement éthique de notre société. Ainsi, le fonctionnement du système marchand n’arrive plus, ou du moins arrive de moins en moins, à « tisser du lien social » c’est à dire à faire en sorte qu’existe une situation (conflictuelle certes) mais tout au moins compatible avec la paix sociale et la vie sur cette planète. Le choix de la libéralisation de toutes les activités humaines, dont l’Accord Général sur le Commerce et les Services (AGCS) est le stade ultime, est une fuite en avant vers ce chaos social et écologique.

L’Histoire n’est pas terminée. L’économie de marché n’est qu’un moment de celle-ci comme l’ont été les autres formations sociales. Les rapports sociaux qui fondent celle-ci n’arrivent plus à encadrer et à maîtriser les conséquences du fonctionnement du système marchand. Les développements ultimes de la logique marchande : exclusion du travail humain de la production et surexploitation des ressources naturelles deviennent incompatibles avec le respect de la vie en société et même de la vie tout court. A charge pour l’Homme, comme il l’a fait au cours de son Histoire de définir de nouvelles manières de vivre en société, et les conséquences du développement technologiques sont telles aujourd’hui, qu’il y va de sa survie en tant qu’espèce vivante.

4 novembre 2004                                                                  Patrick MIGNARD

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