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Publié par PM sur

L’INEXORABLE CRIMINALISATION DU MOUVEMENT SOCIAL

Tous les systèmes d’exploitation ont eu, et auront toujours, des bandes de mercenaires pour défendre les intérêts des possédants. Bandes regroupant des individus sans scrupules prêts à toutes les tâches – faut-il citer des exemples très précis en France et au 20ème siècle ?

Ces bandes ont toujours été présentées par les pouvoirs comme les gardiennes de valeurs, d’éthique (sic), des corps d’élite (re-sic) au service de Dieu, du Prince, du Maréchal, de la « révolution », du Peuple.

Quel que soit leur pedigree, elles ont toujours servi aveuglément les maîtres qui les payait, ont eu du sang sur les mains et ont toujours bénéficié d’une large impunité.

La période actuelle ne fait pas exception.

FRAGILITÉ DE LA PAIX SOCIALE

Le pouvoir s’exerce par la force. Quelle soit brutale, physique, psychologique, idéologique,… il s’agit toujours d’une force dont l’ultime expression est la force physique.

La « paix sociale » est un compromis fragile entre les intérêts de la classe et du pouvoir en place et celles et ceux qui supportent/acceptent cette domination. Ainsi, au Moyen Âge, tant que les paysans croyaient dévotement en Dieu et respectaient sagement leurs maîtres, la « paix sociale », ou du moins la « stabilité » du système, était plus ou moins assurée. Dans notre système salarial, la promesse et l’obtention par les salariés d’avantages sociaux et salariaux ont permis une relative stabilité de la situation sociale.

La mondialisation du système marchand a complètement déstabilisé ce fragile équilibre entre la gestion du capital et les intérêts des salariés. L’exploitation salariale, plus ou moins acceptée, a cédé la place à une exclusion massive qui remet en question la stabilité sociale du système dans son ensemble.

Le pouvoir du Capital ne peut plus compter sur l’achat d’une paix sociale sous la forme d’acquis sociaux accordés aux salariés… la violence répressive tend à prendre de plus en plus la place de la négociation et de la concertation.

LES BASSES ŒUVRES DU POUVOIR

Acculé à gérer un système décadent, à la dérive, l’inavouable est désormais à l’ordre du jour de l’action du pouvoir politique.

Tout ce que la police peut avoir d’abject est entrain de ressortir : mouchards, provocateurs, hommes de mains,… qui ont pour mission de surveiller, dénoncer, intimider, voire terroriser et agresser…. Demain peut-être éliminer (ça c’est déjà vu dans l’Histoire, et en France !)

L’objectif ? Dissuader la contestation sociale, la criminaliser et la faire condamner par une Justice de plus en plus aux ordres du pouvoir.

Médias serviles d’un côté, police et justice aux ordres de l’autre côté,… le mouvement social est encadré et guidé vers des élections dont on sait qu’elles ne servent à rien sinon à reproduire « démocratiquement »(sic) le système.

J’exagère ? Mais alors quel sens prend l’utilisation systématique de la Brigade Anti Criminalité (BAC) dans les conflits sociaux… Brigade dont on ne compte plus les témoignages des méfaits. En quoi ces conflits sociaux présentent-ils un caractère « criminel » ?

Ce n’est évidemment pas une « erreur administrative » que de faire intervenir systématiquement une « unité anti criminalité » contre le mouvement social… c’est de toute évidence un choix politique.

Bien sûr l’État ne le reconnaîtra jamais. Il entretient consciencieusement la confusion, présentant les forces de répression sous leur meilleur jour : le brave gendarme qui assure la paix civile dans une paisible campagne, le CRS – en tenue sportive - sur la plage ou en montagne, la BAC poursuivant les « gangsters »… un peu comme l’Armée qui, dans ses spots publicitaires, apparaît comme quasiment une organisation humanitaire. Mais derrière ce masque, les contrôles musclés et canins des gamins dans les écoles, la cogne des jeunes dans les banlieues, les manifestations, la répression des grévistes et des licenciés, la chasse aux sans papiers... Tout cela dans le silence assourdissant des syndicats de police qui jouent les vierges effarouchées contre l’image « négative » que de mauvais esprits donnent de la police.

Toutes ces forces sont désormais mises au service de la défense du Capital, avec une différence notable par rapport à la période passée : elles sont désormais le dernier rempart en l’absence de toute autre solution économique et sociale.

L’ART DE LA « RÉPRESSION DÉMOCRATIQUE »

Dans un système totalitaire, la répression, si j’ose dire, va de soi, elle n’a pas à se justifier, elle est.

Dans un système qui se veut démocratique, les choses sont plus compliquées. Il faut que cette répression existe, mais qu’elle soit légalement et éthiquement justifiée. Tant que cette répression concerne des domaines qui font majoritairement consensus – grand banditisme, terrorisme, délinquance courante – elle peut s’exercer sans grande complication. Mais dès qu’elle touche le domaine social, les choses se compliquent. En effet réprimer d’ « honnêtes citoyens » qui ne veulent que pouvoir vivre décemment est difficilement accepté.

C’est donc progressivement et à doses homéopathiques que l’opération est menée.

Par exemple : on commence par fouiller des gamins dans des écoles pour soi-disant « chercher de la drogue » (ben voyons !), mais on se garde bien de faire la même opération dans un lycée ou l’Université où on aurait statistiquement plus de chance d’en trouver. Cette démarche, d’une lâcheté et d’une bassesse absolues, tant pour les autorités qui les commandent que pour les « hommes de mains » qui l’effectuent, est sans danger – les gamins ne se révoltent pas – Si la société civile ne réagit pas à cette ignominie, on passe au stade supérieur.

Autre exemple : le pouvoir prend l’habitude, et ainsi habitue, de faire intervenir la Brigade Anti Criminalité – brutes « déguisées » en civils qui mouchardent, provoquent et cognent - dans le cas de conflits sociaux – ouvriers, étudiants, lycéens - jetant le trouble, au travers de médias serviles et complaisants dans une opinion publique conditionnée.

On peut opérer de la même manière concernant l’information : on déclare par exemple vouloir contrôler Internet pour des questions de « pédophilie » (qui peut-être contre ?), mais on étend subrepticement ce contrôle à l’ensemble des échanges sur Internet, sans oublier évidemment le domaine politique.

Ainsi, petit à petit, on habitue l’opinion publique à accepter l’inacceptable, l’ignoble et l’infâme… Si celle-ci réagit violemment, le pouvoir peut toujours arguer que c’est pour le bien-être collectif (ben voyons !) qu’il agit, reculant momentanément, pour revenir plus tard à la charge.

Le Pouvoir est ainsi en passe de « criminaliser » l’ensemble des actions qu’il juge néfaste à ses intérêts, avec espère-t-il, sinon la bénédiction, du moins le silence, de ses propres victimes.

La Justice mise également de plus en plus sous tutelle condamne systématiquement les « délinquants », alors que la police est toujours mise hors de cause, couverte par le Pouvoir et, lorsqu’il y a litige, c’est la police qui enquête… sur la police.

La société civile est ainsi mise sous tutelle par un Pouvoir qui sauvegarde, pour un temps du moins, les apparences, élimine en « toute légalité » les gêneurs et peut continuer ainsi à jouer le rôle qui est le sien : assurer le fonctionnement du système marchand au-delà des crises qu’il génère.

Patrick MIGNARD

30 mars 2009

Voir aussi les articles :

« VERS UNE SOCIÉTÉ POLICIÈRE ? »

« VIOLENCE ET CHANGEMENT SOCIAL »

« LUTTE SOCIALE ET RÉPRESSION »

« VIOLENCES POLICIÈRES ET LIBÉRALISME »

Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

LICENCIER TOUT EN FAISANT DU PROFIT

C’est une démarche qui, non seulement a le don d’irriter, que dis je, de scandaliser, le plus grand nombre de salariés, mais qui a tendance à devenir une pratique courante.
Pourtant, il n’y a rien que de très normal, dans le cadre du système marchand fondé sur le rapport social salarial et la valorisation du capital.


La méconnaissance abyssale de ce qu’est réellement le système marchand dont sont responsables l’enseignement de l’économie et l’information alliée à une certaine paresse politique fondée sur la croyance en ce que racontent les politiciens,… aboutit à un malentendu tragique qui fait prendre, à la majorité, le rêve pour la réalité… jusqu’au réveil !

LES FONDAMENTAUX DU SYSTÈME

Il nous faut, brièvement y revenir, une fois encore.
1 - l’objectif de toute entreprise est, dans le rapport marchand, de faire du profit ;
2 - l’actionnaire est le seul propriétaire de celle-ci, elle lui appartient et a tous les droits en matière de gestion ;
3 - le salarié n’est qu’un moyen de produire de la valeur,… d’où le profit ;
4 - son seul droit est contrat de travail de voir sa capacité de travail être rémunérée à sa valeur : le salaire.

Ces quatre piliers constituent les fondements du système dans lequel nous vivons. Tout tourne autour d’eux, tout ramène à eux, tout se résume à eux.
Les luttes, depuis 150 ans des salariés, ont certes infléchi les conditions de fonctionnement du système, mais en aucun cas n’en ont changé les principes.
Or, ces infléchissements sont devenus une illusion de changement du système qui, en période de crise, reprend tous ses droits.

La relative stabilité, dans les pays industriels développés, jusqu’aux années 80 a fait croire, à tort, aux salariés, que les acquis en matière d’emploi, de salaires, de conditions de travail, de conventions collectives, de durée du travail, de pouvoir d’achat, de protection sociale, de services publics, de retraites,… étaient définitifs. La mondialisation marchande a remis tout cela en question et est entrain de laminer cent cinquante ans de conquêtes sociales.

L’ENVERS D’UNE ILLUSION

Ce n’est, ni par philanthropie, ni parce que les salariés auraient/avaient acquis un quelconque pouvoir dans l’entreprise, que les acquis sociaux ont été accordés. C’est essentiellement pour deux raisons :
- s’acheter la paix sociale ;
- parce qu’à l’époque où ils ont été accordés, le capitalisme occidental pouvait se la payer. Il détenait la technologie, les marchés, la force de travail compétente nécessaire, les capitaux... Son économie dominait le monde.

La mondialisation marchande a « redistribué les cartes » des ressources, des marchés, de l’emploi,… Aujourd’hui, les masques tombent, et l’on revient à une situation qui fait que le Capital ne peut plus se payer la paix sociale en garantissant les emplois et les acquis sociaux naguères accordés.

L’illusion entretenue par la « Gauche »/les « Gauches » et les syndicats est entrain de se déchirer et l’on assiste à ce qu’est véritablement ce système,… chose que l’on avait oublié. C’est désormais l’envers de l’illusion que nous sommes entrain de vivre. Le problème c’est que les « outils » de lutte sociales naguères efficaces pour obtenir des miettes, ne suffisent plus dans une telle situation.

Dans une situation de mondialisation, désormais le Capital a une plus large palette de possibilités pour se valoriser, et une opposition salariale de plus en plus affaiblie… et il en profite (si j’ose dire !) et va en profiter au maximum.

CHANGEMENT DE PROGRAMME

Tant que le système a pu concilier plus ou moins pacifiquement l’impératif de valorisation du capital et les revendications salariales, il l’a fait et a eu en retour une relative « paix sociale ».

Aujourd’hui cet « équilibre » est rompu.

En effet, actuellement, quand des « fonds de pension », actionnaires exigent non plus 5% de valeur actionnariale, mais 20, voire 25%,… il faut bien « surentabiliser » l’entreprise… et les économies vont se faire où d’après vous ?

Lorsqu’une entreprise peut produire, la même marchandise, avec une masse salariale divisée par 5, par 10 voire plus, croyez vous qu’elle va se priver de cette opportunité,… qui va lui permettre de gagner des parts de marché ?

Ce que l’entreprise ne pouvait se permettre il y a un demi siècle, elle peut aujourd’hui se le permettre.

Autrefois l’entreprise faisait du profit et avait besoin de force de travail locale.

Aujourd’hui l’entreprise fait du profit, peut en faire encore plus en se passant de plus en plus de force de travail (accroissement de la productivité du travail), ou en trouvant une main d’œuvre moins chère. Le choix est vite fait.

L’important n’est pas seulement de faire du profit, mais d’en faire toujours plus…. Ce qui explique que l’on puisse licencier, voire liquider l’entreprise, alors que l’on fait du profit.

« Ils n’ont pas le droit de faire ça ! » s’exclament les salariés effondrés devant les grilles d’entreprise en voie de délocalisation.

Mais si « ils ont le droit ». Ils sont propriétaires du capital et ont le droit d’en disposer à leur guise sans compte à rendre aux salariés. C’est même un droit essentiel dans ce système.

« Ce sont des licenciements boursiers » rajoutent les licenciés. Et alors ? De telles pratiques ne sont pas interdites, au contraire elles permettent de rentabiliser au maximum le capital,… ce qui est l’objectif fondamental de ce système.

Mais alors allez vous dire, ce sont les salariés qui font les frais de l’opération !

Quand les salariés ont-ils été à l’abri des aménagements du capitalisme ?

Il est justement dans leur situation de salariés d’être la variable d’ajustement du système… ils l’ont toujours été et le demeureront tant que ce système fonctionnera.

« Pourquoi l’État permet-il de telles pratiques ? ». L’État est le garant de ce système ; on le voit mal aller à l’encontre de ses principes fondateurs… même la Gauche quand elle est au pouvoir s’y est pliée. L’État temporise pour éviter les problèmes sociaux mais ne change strictement rien quant à la mécanique du système. Et quand l’État se déclare « scandalisé par cette situation », il s’agit bien évidemment de pure hypocrisie… la preuve en est qu’il ne change fondamentalement rien au mécanisme d’exclusion,… il l’aménage la plupart du temps avec les syndicats - pour éviter les turbulences sociales.

Bien sûr, le MEDEF essaye lui aussi de temporiser, de se justifier, de parler de l’entreprise capitaliste comme de la quintessence de l’économie et de la vie sociale, comme de l’entreprise créatrice des richesses, créatrice d’emplois, facteur de croissance et de protection de l’environnement,...

Le MEDEF a bien sûr le droit de raconter n’importe quoi, ce qui n’implique pas que l’on soit obligé de le croire quoique la majorité marche dans cette fable !

Croire ou ne pas le croire y va de la responsabilité de chacun. Croire en ses élucubrations idéologico-sociales nuit gravement à la conscience politique… la preuve !

Ainsi donc en résumé, il n’y a pas fondamentalement contradiction entre licencier et faire du profit, c’est même finalement tout à fait dans la logique du système dans lequel nous vivons, et c’est même le contraire qui serait surprenant.

Conclusion : les salariés n’ont pas fini de se lamenter devant les portes de leur entreprise tant qu’ils accepteront cette logique.

Patrick MIGNARD
23 Mars 2009

Voir aussi les articles :
« ILS NE CÈDERONT PLUS RIEN »
« MARCHANDISE : RETOUR AUX FONDAMENTAUX »
« SYNDICATS : LA FIN ? »

 

Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

QUI VOLE UN ŒUF, VOLE UN BŒUF ?...

… POUR UNE ECONOMIE POLITIQUE DU « VOL »

Il est des mots tabous pour lesquels toute tentative de réflexion, voire d’explication, devient synonyme de réprobation. « Vol » en fait partie.
Tenter d’expliquer le vol, de lui trouver un sens, serait-il l’approuver et par là même faire œuvre d’immoralité ?

Le vol, comme tout autre acte, est un comportement social qui mérite d’être expliqué et ce d’autant plus que le contexte dans lequel il survient est loin d’être exemple de pureté.

L’INCONTOURNABLE QUESTION DU RAPPORT À L’AUTRE

Voler c’est s’approprier le bien d’autrui, attitude universellement condamnée dans toutes les civilisations et dans tous les temps. Si l’on en reste simplement à ce constat, il n’y a plus rien à dire.

Pourtant la question du vol pose un problème autrement plus important qu’un simple problème moral,… celui du rapport à l’autre. En effet, je ne peux pas me voler moi-même… Le vol ne peut se concevoir qu’avec l’existence de l’autre. Sans l’autre, pas de vol possible. Mais l’existence de l’autre implique-t-elle l’existence du vol ?

D’abord, qui est l’autre ? Je peux dire qu’il n’est pas moi… ce qui paraît évident, mais qui n’est pas aussi définitif dans sa définition. En effet, l’altérité pose la question fondamentale de la reconnaissance de l’autre. Il n’est pas moi, mais il a un « quelque chose », une sorte de « second moi » qui me le rend semblable. Je ne suis pas lui mais je peux me reconnaître en lui. Son existence lui appartient, de même que la mienne m’appartient... Pourtant son existence m’interroge, elle ne m’est pas indifférente puisqu’elle est à côté de la mienne, elle interfère avec la mienne.

Est-ce que ce qui lui appartient, m’appartient aussi ? Se pose alors la question de l’appartenance, de la possession, de la propriété.

Le seul bien dont dispose un individu est ce seulement son existence ?

Evidemment non, l’être humain, comme les animaux dont il fait partie, pour vivre, s’approprie une partie de ce qu’il trouve dans la nature. Mais la Nature ne répartie pas les biens quelle met à disposition entre les êtres vivants… à eux de se les procurer, de se les partager, de ce les répartir. Pour cela un effort est nécessaire et en cas de rareté ou de difficulté (attraper la proie), une compétition et / ou une collaboration s’instaurent.

Les animaux agissent selon l’instinct, ont des modèles comportementaux, de compétition et / ou de collaboration, qui les déterminent dans cette quête de la subsistance, de la possession, modèles que, par espèces, ils reproduisent, inconsciemment, au fil des générations, modèles imposés par la nature et qu’ils ne sont pas en capacité de pouvoir modifier dans leur essence, sinon de s’y adapter.

L’être humain a un comportement tout autre… il n’a pas de « modèle » préétabli, naturel,… il produit du social, autrement dit son comportement est de sa propre initiative. Il entre donc en conscience avec l’autre…. et avec lui-même.

LE RAPPORT, SOCIAL, À L’AUTRE

Mon existence ne peut se concevoir que par rapport à l’autre… même si individuellement et temporellement je peux m’en passer et même le théoriser. L’Histoire humaine est une histoire sociale, c’est un fait consubstantiel à l’être humain. Or, le rapport à l’autre nous venons de le voir, est un rapport conscient, construit par moi et par l’autre. Il y a donc, une dimension sociale, non seulement à ce qu’il est, par rapport à moi, mais aussi par rapport a ce dont il dispose. Sa manière de se le procurer et d’en disposer est une question sociale… en ce sens elle m’implique. De même que, ce dont je dispose, implique l’autre.

On peut même affirmer que la manière dont je me procure des biens indispensables à mon existence est une manière d’être par rapport à l’autre. Ceci est particulièrement évident dans une société fondée sur la division des tâches.

Il y a donc un lien direct entre l’être social, la structure sociale et ce dont il dispose pour vivre.

En filigrane de tout cela, bien entendu, la question de la propriété.

Dénier, à un individu, toute propriété de bien est évidemment absurde et ne peut aboutir qu’à un totalitarisme social dont l’humanité a fait la triste expérience au 20e siècle. Par contre, poser la question de l’appropriation, c’est-à-dire des conditions sociales de l’acquisition, d’un bien est non seulement légitime mais éthiquement et socialement indispensable. Il n’y a pas atteinte à la liberté de l’individu puisque cette liberté ne peut être conçue que dans un cadre social… et c’est justement, l’Histoire de l’Humanité le prouve abondamment, en refusant de poser la question de la liberté dans ce cadre que se produisent la plupart les abus et atteinte à la dignité et aux intérêts des personnes.

VOL, ÉTHIQUE ET PRATIQUES SOCIALES

Une fois dit cela, peut-on justifier socialement la pratique du vol, c’est-à-dire l’appropriation sans consentement d’un bien détenu par une autre personne ? la réponse est non. Mais l’on voit que c’est le terme « socialement » qui pose problème…En effet, si le vol pose un problème d’éthique, celui-ci ne peut pas être détaché des fondements éthiques de la société dans laquelle le vol se produit.

Par exemple : au Moyen Age, les paysans n’avaient pas le droit de tuer du gibier qui appartenait au seigneur – tout contrevenant était condamné pour vol, même s’il mourrait de faim. On comprend tout de suite le caractère scandaleux et injuste d’un jugement qui condamne un acte induit par des conditions sociales particulières. Le « vol » apparaît comme une nécessité et sa condamnation morale n’est que l’expression de l’immoralité des conditions sociales dans lesquelles il se produit. Il en est de même aujourd’hui lors des « opérations de réductions » qui consiste pour les plus précaires à se servir dans les supermarchés et à se redistribuer les marchandises saisies.

Dans le cas des paysans du Moyen Âge il s’agit de la négation du caractère privé du gibier, dans le cas des « réducteurs » il s’agit de la négation du statut marchandise de la production… dans ce dernier cas, il y a négation de la valeur d’échange de la marchandise. Dans les deux cas il s’agit d’actes hautement politiques (au sens noble du terme)… et pas de simples délits comme le Pouvoir, garant du système dominant, voudrait nous le faire croire

Ceci renvoie bien évidemment à la question de l’équité et de la Justice… donc aux fondements éthiques des relations sociales.

Dans le rapport salarial, la disposition de la richesse produite est conditionnée par l’occupation d’un emploi qui donne droit à un salaire et donc au moyens de se procurer des biens et services. Or cette condition est en grande partie dépendante du fonctionnement du capital et du marché de la force de travail... voir le cas des sans emplois, des exclus, des pauvres.

Le « sans emploi » qui vole pour vivre est-il condamnable ? Oui au terme de la loi marchande ! Mais la situation n’est-elle pas, au niveau du principe, la même que celle du paysan du Moyen Age ?

Or, jamais le problème n’est évidemment posé en ces termes, simplement parce que ce serait reconnaître le « mal fondé » éthique de ce la société appelle le délit et qui n’est que l’expression du « mal fondé » éthique de celle-ci.

Mais va–t-on rétorquer, tous les cas de « vols » ne sont pas aussi « purs ». Ce qui renvoie à une autre question :

Est-ce à dire que, si les rapports sociaux étaient éthiquement et réellement démocratiques, équitables et non marchand, le « vol » n’existerait pas ?

La réponse est difficile et hasardeuse à donner. Probablement que le « vol » existerait / existera, mais une chose est sûre le phénomène « vol » sera de nature différente de ce qu’il est aujourd’hui.

Inégalités, exclusions, spéculations, conditionnement publicitaire, développement des appétits de consommation, etc… qui sont les pratiques maîtresses du système marchand font tout pour conditionner à l’appropriation facile, à la surconsommation, au désir de dépassement,… et de possession.

On peut faire l’hypothèse que le vol, dans des conditions sociales ayant pour fondement le respect de l’individu, diminuera significativement – une partie de ses fondements sociaux disparaîtront.

Le « vol résiduel », car il y aura toujours des individus avides de posséder plus que l’autre devra être réglé socialement par l’éducation et la pratique de la vie collective.

Enfin, il est de plus intéressant de constater que ce sont les filous, les escrocs et les exploiteurs (l’exploitation étant une forme de vol), jamais ou rarement condamnés (des noms ?), tous personnages de premier plan dans notre société marchande, qui sont les premiers à demander la condamnation des « voleurs » et à émettre les plus grandes réserves sur le type d’analyse qui fonde ce texte, prouvant par là même qu’ils savent parfaitement où sont leurs intérêts présents et futurs.

Patrick MIGNARD

16 Mars 2009

Voir aussi les articles :
LE TRAVAIL EN QUESTION (1) (2) (3) (4)

 

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L’INSOLUBLE PROBLEME DE LA REPARTITION DES PROFITS

La répartition des profits des entreprises et une question qui refait régulièrement surface dans la polémique sociale, et la crise actuelle la remet bien évidemment au goût du jour.
L’urgence, toujours repoussée, d’une réponse a fait dire dernièrement au « turbo président », une énormité – une de plus - qui en dit long soit sur son incompétence, soit sur sa démagogie,… peut-être sur les deux.

Dans ce que certains ont appelé une « règle des trois tiers », il a tout simplement suggéré « un partage égal des profits entre salaires, investissement et dividendes »( ???).

La pire des choses qui pourrait lui arriver c’est que les salariés lui disent « chiche ! » et enclenchent un mouvement social sur cette base,… chose dont les syndicats complaisants se sont bien gardés de faire.

EFFET D’ANNONCE ET QUESTION ESSENTIELLE

Disons le tout de suite, cette règle n’est qu’un effet d’annonce – un de plus – sans conséquence concrète, mais elle pose un problème très intéressant.
- « effet d’annonce » parce qu’il est évident que le pouvoir n’a absolument pas l’intention de procéder à ce changement. Pourquoi ? Parce que ce changement touche de fait, et de droit, aux « fondamentaux » du système marchand dont il est le garant.
- Le point fondamental abordé par cette question est celui de la « répartition de la richesse dans le système ».

Dire que « le tiers du profit doit aller aux salariés… en plus de leur salaire » a fait immédiatement réagir le MEDEF dont la porte parole a dit clairement toute la divergence qu’elle avait de tels propos en précisant que « seul l’actionnaire peut décider du montant des dividendes », car cela relève du « droit de propriété », ajoutant pour faire bonne mesure qu’il « n’était ni du ressort de l’État, ni des salariés d’en décider ».

Madame PARISOT n’a fait que rappeler ce qu’est le capitalisme et en rappelant ces règles élémentaires, et tout à fait exactes, elle a implicitement signifié que cette question ne relevait pas d’une simple arithmétique de gestion, mais était fondamentalement politique.

Le fondement du capitalisme c’est, rappelons le une fois encore, le « rapport social fondé sur l’investissement du capital dans un processus de production en vue de création de valeur,… et pour se faire, l’embauche de salariés (seul le travail étant créateur de valeur) qui, en échange de leur force de travail reçoivent un salaire équivalent à la valeur estimée de celle-ci ».

Etablir dans ce système une «  répartition du profit aux salariés et ce de manière « inégalitaire » par rapport aux actionnaires (le tiers du profit en plus du salaire) » est bien évidemment inacceptable pour les actionnaires… pire à leurs yeux, elle remet en question le fondement même du système marchand.

LES RAPPORTS PROFITS / SALAIRES : MYTHES ET RÉALITÉS

Avant d’être quantitative, la question est, comme le souligne la représentante du MEDEF qualitative… Il s’agit d’un principe d’organisation sociale que l’on pourrait résumer lapidairement par : l’actionnaire est tout, le salarié rien ! Ce n’est pas une affirmation provocatrice mais la réalité du système marchand.

Que seul le travail humain crée de la valeur est une affirmation difficilement contestable… en effet, même les machines sont issues du travail humain ! Ce n’est que dans cette mesure que la force de travail est acceptable et acceptée… Mais créer une entreprise n’a pas pour objectif de créer de l’emploi, seulement de valoriser un capital, le travail n’étant, d’une certaine manière, qu’un «  mal nécessaire ». La preuve en est que l’entreprise essaye de se passer de plus en plus de travail en rentabilisant le peu qu’elle utilise. L’objectif de l’entreprise est de faire du profit, un point c’est tout.

On comprendra dès lors que le salarié n’a aucun droit sur le profit, qui ne lui appartient juridiquement pas. Il a reçu son salaire, équivalent valeur de sa force de travail,… le reste ne lui appartient pas.

Vouloir attribuer, en plus, au salarié, une part du profit est vécu, à juste titre, comme un déni juridique par l’actionnaire. Une négation même de l’ordre social marchand.


Résultat des sociétés non financières en 2006 en pourcentage du bénéfice après impôt :
Revenu distribué aux actionnaires : … 74, 6 %
Intéressement et participation :………. 15, 9 %
Reste à l’entreprise : ……………………...... 9, 5 %

Source – ALTERNATIVES ÉCONOMIQUES - mars 2009


Mais me direz vous, les salariés touchent déjà, dans certains cas, une part du profit sous la forme de « participation » ou d’ « intéressement » ! C’est exact, mais ça été imposé par les salariés et accepté par le patronat pour s’acheter la « paix sociale » dans l’entreprise, ça demeure tout de même limité et exceptionnel… la règle étant que le profit appartient aux actionnaires et à eux seuls.

L’ordre économique et social marchand n’est absolument pas remis en question.Que le profit soit important, là n’est pas la question.

LA SEULE ET VRAIE QUESTION

C’est celle des conditions de production des richesses et de leur la répartition dans notre société. Or ce problème n’est pas du tout technique,… il est essentiellement politique. Autrement dit, qui décide ce que l’on produit, comment on le produit et comment on le répartit ?.

L’Histoire humaine n’est en fait que la succession des formes d’organisations sociales censées répondre à ces questions.

On imagine ainsi difficilement, le chantre du libéralisme en France, le porte parole présidentiel du MEDEF, le liquidateur des services publics, des régimes de retraites par répartition et de la protection sociale,… oser s’attaquer à cette question essentielle.

La gauche et l’extrême gauche qui sont incapables de poser correctement la stratégie de changement de ce fonctionnement, comment un représentant de ce système marchand le pourrait-il ?

Toucher à la répartition des profits c’est toucher au statut même du capital et du travail et à son corollaire, le droit de propriété sur les moyen de production. On est là au cœur de la véritable problématique du changement social. Le MEDEF l’a immédiatement vu,… Sarkozy, emporté par sa démagogie et son incompétence n’a pas mesuré, une fois encore, la portée de ses propos…

Quant aux syndicats de salariés, ils se sont empressés de regarder ailleurs montrant en cela où sont leurs véritables préoccupations.

Le partage des profits – du surproduit social – est réglé une bonne fois pour toute dans le système marchand et en constitue son essence… Il n’y a rien d’autre à espérer en son sein.

La question du partage de la richesse est, et demeure, le vrai problème de toutes les sociétés depuis l’origine des hommes, ça constitue toujours la question essentielle du présent et de l’avenir.

Patrick MIGNARD
9 Mars 2009

 

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