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Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

LA SOCIETE DU « NON DIALOGUE »

Les « partenaires » sociaux parlent sans cesse de « dialogue » comme moyen de résoudre les problèmes sociaux, mais au fil des conflits on se rend compte que ce soit disant dialogue est complètement piégé. La dernière expérience que viennent de faire les salariés, mais aussi les étudiants français est particulièrement instructive à cet égard.

Il ne s’agit pas de dramatiser ou de prendre une position maximaliste, il s’agit de comprendre exactement ce qu’il se joue et quel est l’état des forces en présence.

LES CONDITIONS DU DIALOGUE SOCIAL

Il n’y a pas une définition précise et « officielle » de ce qu’est un dialogue social, mais essayons tout de même de le définir.

Le dialogue social se fonde sur un consensus implicite entre plusieurs parties susceptibles et d’accord pour faire des concessions.

Le fondement de tout dialogue est la possibilité d’aboutir à une entente, à un compromis, un accord dans lequel chaque partie trouve un intérêt.

Pour qu’il y ait dialogue il faut une triple condition :

une situation qui fasse problème

des interlocuteurs,

« quelque chose » à négocier

La situation, nous la connaissons tous : un système économique fondé sur le profit et qui, dans les conditions actuelles de mondialisation marchande – et qui plus est, de crise - fait que, les anciens pays industriels, voient leur puissance économique relativisée.

Les interlocuteurs nous les connaissons également mais ils prennent une configuration nouvelle :

l’État, considéré à tort comme neutre dans le rôle de l’arbitre joue de plus en plus évidemment en faveur des possesseurs du capital ;

les possesseurs du capital, de plus en plus exigeants – fonds de pensions, Hedge Funds, en particuliers – et qui jouent leurs intérêts sur une plus grande échelle.

les interlocuteurs : les représentants institutionnels des salariés – les syndicats – qui ne se sont pas rendu compte – ou bien ils mentent – que les actions d’antan sont aujourd’hui des impasses.

Quelque chose à négocier : là est le cœur du problème. Ce qui se négocie, ce n’est plus des avancées sociales comme se fut le cas jusqu’à il y a une dizaine d’années, mais le recul des acquis sociaux. En effet, l’époque est finie, celle où les pays développés industrialisés avaient le monopole de l’économie mondiale et dictaient leur loi.

Les conditions du dialogue social, contrairement aux époques passées, est problématique

LE DIALOGUE SOCIAL EST-IL ENCORE POSSIBLE ?

Et d’abord, a-t-il encore un sens ?

Le seul sens que l’on puisse, aujourd’hui, lui trouver c’est de garder le contact et d’éviter la rupture entre « partenaires sociaux ». À proprement parler, il ne s’agit plus là de sens, mais du constat d’une exigence partagée : donnons nous l’impression de dialoguer pour éviter de nous affronter.

Or, ce qui prétend être un dialogue social actuel est fondé sur une situation complètement déséquilibrée qui peut se résumer à la manière du Pouvoir en place de poser le problème : « OK pour dialoguer, mais nous maintiendrons nos positions et nos décisions quoi qu’il arrive ». Ce qui montre que le soit disant dialogue n’est qu’un prétexte qui n’est absolument pas ce qu’il prétend être.

L’occultation du réel par le discours est une constante permanente de tous les pouvoirs, à toutes les époques. Aujourd’hui, on est dans cette situation dans la mesure où le pouvoir n’a plus rien à négocier, ne cèdera plus rien,… et sait qu’il peut ne rien céder.

L’attitude de l’État est parfaitement logique. En effet, garant de la pérennité du système marchand, fondé comme nous l’avons vu, sur la réalisation du profit, il se doit de gérer ce système – encore qu’il a abandonné une grande partie de ses prérogatives – dans des conditions de mondialisation nouvelles par rapport à la période précédente. Cette garantie, il l’assure par la référence exclusive aux lois du marché (libéralisme) et le renforcement de la répression (l’État gendarme succédant à l’État providence).

Il a, face à lui, des partenaires qui, non seulement sont dispersés et en désaccord sur les mesures tactiques, à fortiori stratégiques, à prendre et qui n’ont recours qu’à de vieilles méthodes (manifestations, grèves, pétitions, protestations, délégations) dont on sait, par la pratique, qu’elles sont totalement obsolètes.

NON DIALOGUE ET AFFRONTEMENT

Est-ce à dire que la situation est bloquée ?

Oui, certainement, en ce sens qu’elle ne peut générer aucun changement. Les forces « conservatrices » au pouvoir n’ont face à elles aucune force ayant un projet et une stratégie alternative. Nous en avons aujourd’hui un parfait exemple.

Les trépignements d’impatience, les défilés à répétition, la radicalité des discours, qui tiennent lieu d’une soit disante stratégie politique, ne sont que des manifestations d’impuissance qui veulent donner l’illusion d’une dynamique qui en fait n’existe pas.

Ce blocage est incontestablement générateur de violence sociale. L’exaspération succède tout logiquement au piétinement.

Cette violence, si elle est logique et compréhensible, est parfaitement stérile. Certes, elle alimente chez certains les fantasmes du « grand soir », ou de l’ « insurrection qui vient »,… pour d’autres elle doit être canalisée vers les urnes. Pour le pouvoir, elle est une aubaine, lui permettant de faire un « pot pourri » de « violence-délinquance-irresponsabilité politique-terrorisme,…. », le tout, avec l’appui des médias complaisants, aboutissant à une remise en question des libertés publiques et un renforcement de l’arsenal répressif.

Allons nous vers un affrontement social, un conflit ouvert entre possesseurs et leurs valets et victimes de ce système qui nous conduit à la ruine ?. Peut-être ! Qui peut l’affirmer ?

Une chose est cependant sûre : l’affrontement, aussi logique soit-il, s’il se produit, sera écrasé par les possédants qui disposent d’un arsenal et de bandes armées prêts à celui-ci, mais savent aussi également qu’aucune alternative sérieuse à leur système n’est prête à prendre la relève… autrement dit les hésitants, la majorité, dans tous les cas de figure, se retournera vers eux et non contre eux – ce qui explique aujourd’hui la situation apparemment absurde qui fait que la majorité vote contre ses propres intérêts.

En attendant,… quoi au juste ? … on nous fait patienter en organisant des manifestations folkloriques et colorées, des pétitions par centaines et des élections… ; jusqu’aux vacances qui joueront le même rôle que les massages sur des membres endoloris par l’effort.

Soyez cool,… « on » s’occupe de tout !

Patrick MIGNARD 20 mai 2009

Voir aussi :

« ILS NE CÈDERONT PLUS RIEN ! »

« CES LUTTES À BOUT DE SOUFFLE »

« LE SENTIMENT TRAGIQUE DE L’INUTILE »

« MANIFESTE POUR UNE ALTERNATIVE »

Publié par PM sur

FORMES DU POUVOIR ET RAPPORTS SOCIAUX

Il est fort pratique, nous allons le voir, de ne parler que des premiers pour faire totalement l’impasse sur les seconds, déviant ainsi la réflexion sur des aspects accessoires et politiciens de l’organisation sociale et préservant de fait l’essentiel du système en place.

La forme que prend le pouvoir est devenue le cadre essentiel de la réflexion politique. Ce n’est pas nouveau, tous les systèmes, dans leur égocentrisme, et leur souci permanent de dévier tout risque de contestation fondamentale, ont limité juridiquement et idéologiquement le champ de la réflexion politique à ce seul aspect de leur existence.

POUVOIR ET SOCIÉTÉ

Dans l’espèce humaine, le pouvoir n’a de sens qu’au regard des relations sociales qu’il garantit. Or, ces relations sociales, contrairement aux autres animaux, ne sont pas un modèle comportemental dicté par la Nature. Elles sont d’une nature toute différente, elles sont d’essence consciente ; autrement dit soumise à la volonté des femmes et des hommes… ce qui explique que les êtres humains ont une Histoire et pas les autres espèces vivantes.

La forme du pouvoir est donc variable. Cette variabilité a pour paramètres : la conscience, les valeurs éthiques et les intérêts en jeu entre les individus. Le pouvoir n’est donc pas exclusivement un enjeu biologique, mais aussi social, donc politique.

La forme du pouvoir, la manière de s’organiser collectivement, de se répartir les tâches, de prendre des décisions, a donc à voir, a un lien, avec la structure sociale qu’il représente et garantit. On ne peut donc pas poser la question du pouvoir sur un plan simplement formel et réduire son débat à une simple question d’organisation matérielle… ce qui est le cas aujourd’hui.

En effet, dés qu’un système de production et de distribution des richesses produites est installé, il verrouille toute possibilité de changement en déclarant que la structure des rapports sociaux en place est définitive et indépassable. Tous les systèmes, sans exception, s’y sont pris de cette manière pour assurer leur hégémonie et leur pérennité. Tous ont disparu dans les affres de leurs contradictions démentant ainsi le mythe, consciencieusement entretenu, de leur éternité.

DROIT ET LÉGITIMITÉ DU POUVOIR

Le Droit, qui est représenté comme un absolu, n’est en fait qu’une construction intellectuelle et politique servant à justifier et à garantir les rapports sociaux. Je n’en prendrai pour preuve que le changement permanent du « Droit » à chaque changement de système économique et social : ce qui était vrai et acceptable hier devenant faux et condamnable aujourd’hui. Qu’en sera-t-il demain pour les principes juridiques et lois d’aujourd’hui ? Qui peut affirmer que les règles qui sont les nôtres aujourd’hui, et présentées comme sacrées, ne seront pas objet de dérision et de critique dans l’avenir,… comme nous le faisons parfois au regard des règles du passé ?

Ce n’est pas un hasard si la règle juridique est présentée comme intangible et absolue. Elle est la seule garantie idéologique, et menace éthiquement et politiquement acceptable, pour dissuader toute remise en question du rapport social dominant. Violer la loi c’est, en fait, se mettre en porte-à-faux par rapport à l’organisation sociale du moment. C’est le cas de la « désobéissance civique »… ce qui pose la question de la « légitimité » de la règle juridique

L’existence de la règle juridique est-elle une garantie de démocratie ?

Bien sur que non ! La règle juridique peut-être en effet fondée sur des principes parfaitement inégalitaires et même éthiquement condamnables,… elle n’en demeure pas moins la règle qui régit l’ensemble des rapports sociaux et qui, dans l’inconscient collectif, constitue la règle de conduite à suivre et à respecter.

Un pouvoir ne tient que lorsque la base économique et sociale qui le constitue tient. Lorsque les rapports sociaux, qu’il représente et garantit, changent, le pouvoir change. L’Histoire en fait une règle absolue.

Cela dit, il y a changement et « changement ».

Le pouvoir, pour des rapports sociaux identiques, peut prendre différentes formes. Ainsi nous avons pour des rapports sociaux marchands identiques : des monarchies, des républiques, des états centralisés, fédéraux, et même dans certains cas, pour sauvegarder le système, des dictatures : Italie fasciste, Allemagne nazie, Espagne franquiste, Grèce des colonels, Chili de Pinochet, Argentine des militaires, etc… Ces régimes n’ont absolument pas mis en question les rapports sociaux marchands, au contraire ils les ont garantis. On peut même dire qu’ils ont été l’ultime rempart pour les sauver.

Si le débat sur la forme du pouvoir n’est pas à négliger… il vaut mieux par exemple être dans une démocratie parlementaire que dans une dictature militaire,… il est bon de savoir que l’essentiel du problème n’est pas là – la forme pouvant rapidement changer - et que ce débat recouvre autre chose qu’une question éthique, morale, voire constitutionnelle… il s’agit de la forme des rapports sociaux… de la manière dont les individus s’organisent socialement, comment ils produisent et répartissent les richesses produites. Perdre de vue cet élément essentiel, condamne à ne s’en tenir qu’aux apparences du problème : la forme du pouvoir.

Par exemple : le système électoral a ceci d’extraordinaire qu’il entraîne, formellement et cantonne, la réflexion politique dans le champ étroit de la forme du pouvoir, à l’exclusion de ce qui le fonde, les rapports sociaux. Autrement dit, il ampute volontairement, mais formellement, démocratiquement ( ?), le problème de l’organisation sociale, de ce qui la constitue essentiellement. C’est un peu comme si, sous l’Ancien Régime, en pleine période de la Monarchie Absolue, on avait envisagé, et c’est ce que l’on a fait jusqu’au 18ème siècle, la question du Pouvoir, sans remettre en question l’organisation sociale – et ne s’en tenir qu’aux rapports entre « Dieu et le Monarque » ( ?)… autant dire que le vrai problème n’est jamais posé.

La « forme démocratique » actuelle du pouvoir, même si elle est préférable à d’autres formes, ne fait pas exception à cette règle. Elle garantit l’existence et la pérennité du rapport social salarial qui n’est aucunement un rapport égalitaire. Et le fait que ce rapport social se fonde sur une légitimité « populaire », fabriquée par un appareil idéologique et politique manipulateur de l’opinion publique, ne change rien à ce qu’il est en réalité – le nazisme (autre forme du pouvoir marchand) s’est bien fondé sur une « volonté populaire ».

Le « discours démocratique » qui fonde la structure du pouvoir, oblitère de fait et de droit ce rapport et sait céder sa place à une forme autoritaire quand le système est en péril. Il sait même se donner l’apparence – et plus que l’apparence – de la « légitimité populaire ».

Autrement dit, toute la logorrhée politique sur la/les forme/s du pouvoir, sur le fait de n’envisager ce « changement » que dans la sphère de la politique – c’est-à-dire de la forme et de l’aménagement du pouvoir – n’est qu’une manipulation destinée à masquer l’essentiel : la nature des rapports sociaux, élément fondamental à la base de toute société.

DÉRIVE DE LA RADICALITÉ

Cette volonté de tout pouvoir, de tout système de vouloir limiter toute réflexion, toute contestation dans le cadre « sécurisé » du caractère formel du pouvoir, n’est pas sans conséquence sur l’action politique orientée vers le changement social.

Toute action politique qui ne se fonde pas sur une pratique sociale concrète, alternative, dérive irrémédiablement dans l’action purement formelle de l’aménagement du pouvoir et finalement dans la gestion du système dominant. Toutes les expériences, toutes sans exception, de transformation politiciennes, pacifiques ou violentes, légales ou extra légales du pouvoir, confirment cette affirmation. Ceci n’est pas une affirmation gratuite, pas même une hypothèse, mais la leçon qu’on peut, et qu’on doit, tirer de la lecture de l’Histoire.

Dans le pire des cas, l’illusion est tellement parfaite que l’on est amené à croire qu’il y a eu historiquement création d’un nouveau système… ça n’est qu’une illusion – Le cas des pays dits « socialistes » qui, en quelques années sont « retournés au capitalisme » en est la meilleure, et la plus convaincante, des démonstrations.

Ainsi donc, c’est sous l’éclairage de cette analyse que doivent être appréciés et jugés les discours actuels des organisations politiques. Toute la dérive « social démocrate » et apparentée, partant, du moins pour certains de ses courants, d’une vision radicale de l’action politique – s’explique par l’abandon/l’incapacité, de fonder une pratique sociale alternative… réduisant ainsi l’action politique soit à une simple participation au pouvoir et donc à la gestion du système dominant (cas des partis communistes, ce qui explique leur déclin), soit à une critique purement formelle de celui-ci (l’extrême gauche qui peu à peu prend le chemin des partis communistes).

Ces organisations, se situant quelle que soit leur spécificité, dans la même problématique, monopolisant le débat politique, choyées, instrumentalisées – et on comprend pourquoi – par le Pouvoir en place, stérilise toute prise de conscience et verrouille de fait toute avancée stratégique en matière de changement social.

Dépasser ce cadre et ces organisations demeure un impératif politique absolu.

Patrick MIGNARD

11 mai 2009

Voir aussi : MANIFESTE POUR UNE ALTERNATIVE

Publié par PM sur
Publié dans : #matiere a reflexion

1er MAI 2009 A BERLIN

Chronique d’une provocation annoncée

Le ton a été donné dès la veille par la presse allemande – Die Welt (droite) – annonce un 1er mai particulièrement violent… alors qu’aucun groupe politique ne fait la moindre déclaration… Une véritable « intuition ».

Dès le 30 avril, des milliers de policiers ( leur nombre est estimé entre 5000 et 7000) convergent de toute l’Allemagne sur Berlin, et plus particulièrement sur le quartier de Kreutzberg.

Dès la matinée du 1er Mai – je suis sur place – la situation est calme dans le quartier qui se prépare à une véritable fête populaire – activité intense avec de multiples installations de podium de musique, stands, jeux,…

Les rues menant au quartier commencent à être barrées par des véhicules de polices qui peu à peu bloquent littéralement le quartier… les convois policiers arrivent sans cesse.

Début d’après midi dans le quartier, la fête bat son plein, une foule immense, où se mêlent jeunes et vieux, familles, groupes de musique… Ca sent bon la pâtisserie et la viande grillée… Le métro déverse une foule joyeuse qui vient manifestement faire la fête.

La Police a totalement bouclé le quartier véritablement encerclé comme un ghetto.

Les affrontements commencent vers 18 heures, soit beaucoup plus tôt que lors des 1er mai précédents. Qui a commencé ? Bien malin celui qui pourrait le dire.

Le concept de « désescalade », stratégie mise en place par la police a complètement échoué, elle consistait cette fois, d’après le Die Tageszeitung, du 5 mai à isoler la tête de manif ( ?) à la fin de celle-ci… conclusion, un beau gâchis, et tout ce qui ressemble à une provocation... Mais présentée par les autorités comme une « prévention » ( ?)

Les médias ne montreront que ça, les affrontements, faisant croire que la Police a été agressée et s’est défendue.

Une question se pose tout de même. Que faisait-elle là ? Que ou qui protégeait-t-elle ? En quoi une fête populaire méritait-elle d’être traitée de la sorte ?

Bien sûr aucune réponse n’a été apportée à ces questions.

On ne peut pas ne pas imaginer que si l’État allemand avait voulu qu’il y ait des affrontements, il ne s’y serait pas pris autrement. La situation n’exigeait manifestement pas une telle présence, et il savait très bien qu’agir ainsi c’était mettre le « feu aux poudres ».

L’État allemand réagit ainsi de la même manière que l’État Français (voir les provocations policières de la manifestation du 19 mars), et comme tout État en période de crise,… il provoque des incidents, des affrontements pour mieux les réprimer et détourner ainsi l’attention du « bon peuple » par des images de violences et apparaître comme le garant de l’ordre et de la sécurité …

Patrick MIGNARD

9 Mai 2009

1er MAI 2009 A BERLIN
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CES LUTTES… A BOUT DE SOUFFLE !

Soyons honnêtes avec nous-mêmes : nous ne savons plus quoi inventer comme lutte pour nous faire entendre, pour obtenir satisfaction, pour préserver nos acquis sociaux...

Toute la panoplie des actions que nous ont légués nos prédécesseurs, et que certains conservent pieusement, apparaît comme totalement obsolète, même celles qui pourraient apparaître comme les plus radicales et qui sont devenus des « lieux communs ».

De la manifestation classique, jusqu’à la « retraite, de nuit, aux flambeaux », en passant par la « ronde des obstinés », les pique niques dans les supermarchés, les « cercles de silences », les grèves de la faim, les séquestrations de cadres et de PDG, sans parler des occupations d’usines et d’Universités, nous finissons d’épuiser notre imagination en vaines trouvailles… pour rien.

UN CONSTAT DIFFICILE À ADMETTRE

Quand SARKOZY DE NAGY BOCSA, avec tout le mépris, la démagogie et la morgue qui le caractérisent déclare il y a quelques semaines : « Les grèves en France, on ne les remarque même plus », malgré tout ce que l’on peut penser du personnage, il exprime d’une certaine manière la réalité des luttes actuelles. Il nous dit :« De vos grèves, de vos manifestations, de vos pétitions, je n’en ai rien à foutre »… Et c’est vrai qu’il n’en a rien à foutre… La preuve, c’est que toutes ces manifestations de mécontentements se succèdent, et rien ne change, le Gouvernement continue comme si de rien n’était.

Ces manifestations n’ont plus aucun impact sur le pouvoir

Le doute commence à s’insinuer dans les esprits : et si la méthode que nous employons depuis des décennies, n’était plus efficace, un peu comme un vieux couteau, qui en son temps était tranchant, mais qui aujourd’hui ne coupe plus rien !

Si le capital a su s’adapter remarquablement bien pour se valoriser, d’abord au sein de l’état-nation, puis ensuite dans sa phase de mondialisation, les salariés, eux, ont bien peu innové dans leur manière de lutter contre lui pour défendre leurs acquis.

Face à notre faiblesse, à notre impuissance, le gouvernement ne se contente pas de passer outre à notre agitation stérile, au contraire, il passe à l’offensive. Contre les manifestations de jeunes, les occupations de locaux, d’usine il n’hésite pas à envoyer ses escouades de brutes mercenaires, en uniforme et en civils, ses provocateurs et ses mouchards qui vont jusqu’à mutiler, bien sûr en toute impunité, des jeunes, des manifestants.

En effet, il fut une époque pas aussi éloignée ou l’évacuation d’une usine, d’une université était presque impensable, ou tout au moins créait l’évènement… aujourd’hui c’est quasiment tout les jours que cela se produit… sans qu’il y ai une riposte collective à ces agressions.

Les organisations syndicales et politiques font comme si de rien n’était et continuent leurs pratiques dérisoires, qui organisent des manifestations « traîne-savates », qui préparent des élections, qui parlent de la « prochaine manif » comme une sortie de week end.

On n’ose pas aujourd’hui s’avouer un tel fiasco, une telle capitulation. On se donne l’apparence du contestataire dans des manifestations carnavalesques où le jeu consiste à comparer le nombre de manifestants que l’on estime à ceux de la police... Puis à se précipiter devant le poste de télé pour voir la « gueule que l’on avait »... Et l’on attend la prochaine « manif »…. Dérisoire !

UNE PENSÉE FIGÉE

Au nom d’une fidélité qui tient plus de l’obstination et de la sclérose que de l’analyse politique, les organisations représentatives des salariés n’ont pas changé d’un iota leur mode d’action et se retrouvent aujourd’hui en décalage mortel avec leur adversaire. Non seulement elles ne permettent pas de satisfaire les revendications, mais plus grave, elles sont incapables de préserver les acquis.

A toute manifestation inutile, succède une autre manifestation toujours aussi inutile, ceci nous conduisant lentement aux vacances, durant lesquelles on prévoit une « rentrée sociale chaude »( ?), c’est-à-dire de nouvelles manifestations… et le cycle reprend, toujours aussi stérile et inefficace.

Et l’on s’étonne que les autorités puissent ironiser sur nos formes de luttes ? Mais ce sont elles qui ont raison, nous sommes ridicules !

Mais quel bureaucrate politique et/ou syndical osera le reconnaître, l’avouer en public ? Aucun évidemment… Chacun gère sa petite chapelle et ses privilèges dans le « pré carré contestataire » que lui octroie le système en place.

Quand on leur pose la question, ces mêmes organisations se contentent de répondre : « Et alors, que faut-il faire d’autre ? », comme si ce n’était pas à elles de faire le constat de leur propre impuissance et de trouver des solutions… d’autant plus que les permanents de ces mêmes organisations sont rémunérés, et souvent grassement, pour cela. Et quand on évoque d’autres types d’action, d’autres stratégies, elles les déclarent de facto ridicules, irresponsables et utopiques ( ?).

Une telle attitude en dit long sur ce qu’elles sont et le rôle qu’elles entendent jouer. En fait elles n’ont aucune intention de changer, la situation leur convient parfaitement : gérer ce système en encadrant le mécontentement

Les grands « moralistes » de la « lutte des classes » et autres « gardien de la foi prolétarienne » nous expliquent doctement qu’ « il faut faire confiance aux organisations syndicales et partis politiques, instruments de la démocratie », « et que l’on n’a pas autre chose pour lutter ». Le problème c’est qu’en fait, on ne lutte plus, on subit, on ne fait que protester dans un désert.

La pensée politique critique est aujourd’hui sclérosée, elle ne fonde sa légitimité que sur des organisations complètement bureaucratisées et des stratégies d’un autre temps.

Quand on en est réduit, comme c’est le cas aujourd’hui, à faire de la figuration sous prétexte que l’on n’a pas autre chose à faire, que l’on ne sait pas quoi faire d’autre, on a du souci à se faire, non seulement pour nos acquis, mais aussi pour l’avenir.

Le discours radical, dont certains raffolent, dont les éclats se perdent finalement dans les urnes, après avoir fait écho dans les rues et les médias, nous conduisent tout droit à la démission politique.

POUR UN SIÈCLE DES LUMIÈRES POLITIQUE

Le renouveau de la pensée politique ne passera pas par les vieilles structures politiquement vermoulues, même si elles sont de création récente (des noms ?).

Ce renouveau politique ne passera pas non plus par le ressassement des vieilles litanies pseudo révolutionnaires qui ont toutes fait faillite au siècle dernier, même si elles sont portées par des icônes vénérées et médiatiquement « porteuses » (des noms ?).

Cette renaissance idéologique ne germera pas dans les vieux grimoires jaunis d’une pensée politique qui, même si elle nous a fait rêver, nous conduit au désastre et à l’impuissance politique.

Ce n’est pas non plus en affrontant les bandes armées du pouvoir, véritable dispositif de guerre civile, bien mieux équipées que nous, que nous sortirons de l’impasse dans laquelle nous sommes.

Le vieux monde ne s’effondrera pas tout seul, et même s’il s’effondrait que mettrions nous à la place ?

Le renouveau de la pensée politique ne peut que se fonder sur des pratiques nouvelles et alternatives qui créditent le fait qu’un « autre monde est possible », qui n’est pour l’instant qu’un mot d’ordre vide de sens.

Réinvestir l’économique et le social doit constituer l’axe essentiel de notre engagement.

Jusqu’à quand allons-nous être des marionnettes entre les mains des politiciens et bonzes syndicaux ?

Jusqu’à quand allons-nous croire naïvement que le moindre soubresaut social est le début du « grand changement » ?

Jusqu’à quand allons-nous nous laisser ballotter d’élections « bidons » en manifestations « traîne-savates » ?

Jusqu’à quand allons-nous accepter d’être passifs et de ne pas prendre notre avenir en main ?

La réponse, que je n’ai évidemment pas, à ces questions marquera à n’en pas douter le début du changement auquel le plus grand nombre aspire.

Patrick MIGNARD

6 Avril 2009

Voir aussi :

« MANIFESTE POUR UNE ALTERNATIVE »

« QU’EST-CE QUE CONSTRUIRE UNE ALTERNATIVE » (1) (2) (3) (4)

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