LA PIERRE PHILOSOPHALE
Qu’est ce que la Pierre Philosophale ?
La Pierre Philosophale était le but suprême de l’alchimie. Elle devait changer le plomb en or. (On lui prêtait parfois d’autres vertus non moins fantastiques telles que de prolonger indéfiniment la vie et la jeunesse.) Néanmoins sa recherche n’était pas motivée par la cupidité mais par un élan spirituel. Ce n’était pas le but qui comptait mais le chemin pour l’atteindre. La quête de la Pierre Philosophale n’était pas la recherche d’une recette mais la tentative de parvenir au bout d’un long labeur patient et méticuleux de purification de la matière et de l’officiant.
Livrons nous à un petit jeu et réécrivons ce qui vient d’être dit en nous plaçant dans la perspective d’une volonté de changement social...
La Prise du pouvoir était le but suprême de l’action politique. Elle devait changer l’ordre de la société, l’aliénation en libération. (On lui prêtait parfois d’autres vertus non moins fantastiques telles que de satisfaire le besoin de puissance.) Néanmoins sa recherche n’était officiellement pas motivée par la cupidité mais par un élan humaniste. Ce n’était pas le but qui comptait mais le chemin pour l’atteindre. La quête de la Prise du Pouvoir n’était pas la recherche d’une recette mais la tentative de parvenir au bout d’un long labeur patient et méticuleux de changer la société.
Certes l’exercice est facile... pourtant, au-delà de l’aspect ludique, il ne manque pas d’intérêt.
Toute l’action politique, aujourd’hui, ressemble à cette recherche désespérée de la Pierre philosophale, objet mythique qui devait ouvrir les portes de la félicité de l’abondance et de la richesse... On est à « deux doigts », on y est « presque arrivé », « il suffirait que... »... et tout retombe désespérément comme avant. Alors on recommence, on change de grimoire et de formule, on rajoute certains ingrédients, on en enlève d’autres...une vraie alchimie,... et ça ne marche toujours pas. Finalement c’est le processus de recherche qui supplante l’objectif poursuivi. L’action devient une fin en soi. Le processus même de la recherche en est devenu la raison. On perd de vue l’objectif et l’on se concentre exclusivement sur le moyen.
Cette quête tragi-comique du pouvoir au travers de l’élection, et même à certaines époques, quoique cette méthode soit en grande partie abandonnée, par le coup d’Etat, ou de la « tentative du coup d’Etat », qui a donné naissance au mythe du « Grand Soir », a systématiquement tourné, à terme, au fiasco... Rien n’a changé au point que nombreuses et nombreux sont celles et ceux qui se demandent si cela est possible... le scepticisme et le découragement menacent les plus motivé-e-s.
La succession des échecs de la méthode fait douter de la réalité et de la faisabilité de l’objectif.
Et si la méthode était fondamentalement fausse, erronée ?
Et si le changement social ne se faisait pas suivant cette méthode ?
Et si celui ou celle qui s’arrête de chercher frénétiquement et prend un temps pour repenser la validité de la méthode, avait raison ?
Oh certes il n’a pas spontanément la méthode, la solution, mais au moins il évite de persister dans une impasse. Or, aujourd’hui nous sommes incontestablement dans une impasse.
Dans une action, la répétition des échecs est très rarement enrayée par l’obstination. Il arrive un moment où l’on ne peut pas ne pas se demander si ce n’est pas la méthode elle-même qui est en cause. Il s’agit alors de repenser de fond en comble l’ensemble des données du problème.
Cette obstination « citoyenne » et « militante », qui tient lieu aujourd’hui de pratique politique, tient à la nature même du système économico politique dans lequel nous vivons. Ce n’est pas une exception... tous les systèmes ont agi de la même manière. Ce système a réussi à nous convaincre, du moins pour la plupart, qu’il était l’aboutissement ultime de l’Histoire et qu’un changement ne pouvait s’opérer qu’en son sein et seulement sur quelques aménagements. C’est cette conception qui fonde aujourd’hui toute l’action politique... et c’est cette conception qu’il est urgent de remettre en question.
Ce n’est pas nouveau de remettre en question des évidences. Remettre en question la méthode électorale aujourd’hui équivaut à ce qu’aurait été, et ce qu’a été, la remise en question du caractère divin du pouvoir durant l’Ancien Régime.
Rappelons que l’on a abandonné la Pierre philosophale quand s’est construite la physique moderne, autrement dit lorsque l’on a posé les problèmes d’une autre manière. Tous les progrès, que ce soit dans le domaine des sciences exactes, mais aussi dans celui de l’évolution sociale se sont fait en remettant en question les « évidences ».
Comment peut-on être sûr que l’on fait fausse route et que le changement social se place sur un autre terrain et lequel ?
L’Histoire répond, en partie, à cette délicate question :
les acquis ne sont jamais définitifs comme on aurait tendance à le croire en raisonnant à l’échelle de la vie humaine... la preuve, tous les acquis sociaux, fruits des luttes sociales, sont remis en question (protection sociale, retraites, contrats de travail, services publics,...)
un véritablement changement se fait lorsque un système nouveau prend le relais d’un système pourrissant,
la conscience se forme dans la pratique
Ce à quoi l’Histoire ne répond pas c’est la manière de s’y prendre, du moins dans le détail, et les échéances...
Si tout cela est exact on comprendra le caractère dérisoire de l’action politique actuelle, le gaspillage inouï d’énergie dans des querelles, des discussions et des débats qui sont complètement « à côté de la plaque », « hors sujet », totalement en décalage par rapports aux vrais questions et aux exigences du moment... « débat » qui n’est en fait qu’une opération médiatique de marketing politique.
Bien sûr, les « vieux alchimistes », les politiciens profiteurs, celles et ceux qui ont fait de cette recherche une profession, un faire valoir, un instrument de promotion sociale, perdant au passage de vue l’objectif, vont être réticents pour changer de méthode. Ils vont doctement nous expliquer, contre toute évidence et pour certains (pas tous) avec bonne foi, que c’est la « seule valable », qu’il « ne faut pas désespérer », qu’il « faut persévérer », que « c’est ça la démocratie » (sic).
Avant que nous puissions établir une rupture avec le système marchand, il va bien falloir que nous fassions un « rupture dans nos têtes », que nous pensions l’évolution sociale autrement.
Nous ne convaincrons pas qu’avec des mots, des discussions, de polémiques, des programmes et des promesses, aussi convaincants soyons nous. L’esprit du changement, l’idée de nouvelles relations sociales s’implantera dans les esprits, dans les consciences qu’à partir d’une pratique sociale concrète qui montrera que le monde que nous voulons est non seulement souhaitable mais aussi et surtout possible.
A défaut de cette problématique politique nous retomberons dans les vieilles ornières du passé... nous ne les avons d’ailleurs pas quittées. Nous ne nous en tiendrons qu’à des slogans, certes accrocheurs, mais purement incantatoires. Celles et ceux que nous voulons avec nous, continuerons, à défaut d’autre chose, à croire aux vieilles lunes électorales.
L’action politique telle qu’elle est conçue aujourd’hui, avec bien entendu l’approbation des tenants du système, n’est qu’une recherche de la Pierre philosophale qui capte toute notre énergie citoyenne, nous submerge d’espoir, mais est totalement stérile. Elle est l’élément central de la mystification spectaculaire de la politique et l’instrument de notre aliénation au système.
Le système marchand, de part son développement mondialisé, sa déliquescence sociétale, sa capacité à exclure massivement et l’atteinte irrémédiable à l’environnement qu’il impose à la planète, nous met au pied du mur.
Sans vouloir faire dans le pathétique, à moyen terme, il est possible que le dilemme soit : le changement ou la mort. A nous de choisir ! Mais attention, le temps presse... Nous n’avons plus le droit à l’erreur.
24 juin 2006 Patrick MIGNARD
Voir également les articles :
« ELECTIONS : PARTICIPER OU PAS ? »
LA PIERRE PHILOSOPHALE
Qu’est ce que la Pierre Philosophale ?
La Pierre Philosophale était le but suprême de l’alchimie. Elle devait changer le plomb en or. (On lui prêtait parfois d’autres vertus non moins fantastiques telles que de prolonger indéfiniment la vie et la jeunesse.) Néanmoins sa recherche n’était pas motivée par la cupidité mais par un élan spirituel. Ce n’était pas le but qui comptait mais le chemin pour l’atteindre. La quête de la Pierre Philosophale n’était pas la recherche d’une recette mais la tentative de parvenir au bout d’un long labeur patient et méticuleux de purification de la matière et de l’officiant.
Livrons nous à un petit jeu et réécrivons ce qui vient d’être dit en nous plaçant dans la perspective d’une volonté de changement social...
La Prise du pouvoir était le but suprême de l’action politique. Elle devait changer l’ordre de la société, l’aliénation en libération. (On lui prêtait parfois d’autres vertus non moins fantastiques telles que de satisfaire le besoin de puissance.) Néanmoins sa recherche n’était officiellement pas motivée par la cupidité mais par un élan humaniste. Ce n’était pas le but qui comptait mais le chemin pour l’atteindre. La quête de la Prise du Pouvoir n’était pas la recherche d’une recette mais la tentative de parvenir au bout d’un long labeur patient et méticuleux de changer la société.
Certes l’exercice est facile... pourtant, au-delà de l’aspect ludique, il ne manque pas d’intérêt.
Toute l’action politique, aujourd’hui, ressemble à cette recherche désespérée de la Pierre philosophale, objet mythique qui devait ouvrir les portes de la félicité de l’abondance et de la richesse... On est à « deux doigts », on y est « presque arrivé », « il suffirait que... »... et tout retombe désespérément comme avant. Alors on recommence, on change de grimoire et de formule, on rajoute certains ingrédients, on en enlève d’autres...une vraie alchimie,... et ça ne marche toujours pas. Finalement c’est le processus de recherche qui supplante l’objectif poursuivi. L’action devient une fin en soi. Le processus même de la recherche en est devenu la raison. On perd de vue l’objectif et l’on se concentre exclusivement sur le moyen.
Cette quête tragi-comique du pouvoir au travers de l’élection, et même à certaines époques, quoique cette méthode soit en grande partie abandonnée, par le coup d’Etat, ou de la « tentative du coup d’Etat », qui a donné naissance au mythe du « Grand Soir », a systématiquement tourné, à terme, au fiasco... Rien n’a changé au point que nombreuses et nombreux sont celles et ceux qui se demandent si cela est possible... le scepticisme et le découragement menacent les plus motivé-e-s.
La succession des échecs de la méthode fait douter de la réalité et de la faisabilité de l’objectif.
Et si la méthode était fondamentalement fausse, erronée ?
Et si le changement social ne se faisait pas suivant cette méthode ?
Et si celui ou celle qui s’arrête de chercher frénétiquement et prend un temps pour repenser la validité de la méthode, avait raison ?
Oh certes il n’a pas spontanément la méthode, la solution, mais au moins il évite de persister dans une impasse. Or, aujourd’hui nous sommes incontestablement dans une impasse.
Dans une action, la répétition des échecs est très rarement enrayée par l’obstination. Il arrive un moment où l’on ne peut pas ne pas se demander si ce n’est pas la méthode elle-même qui est en cause. Il s’agit alors de repenser de fond en comble l’ensemble des données du problème.
Cette obstination « citoyenne » et « militante », qui tient lieu aujourd’hui de pratique politique, tient à la nature même du système économico politique dans lequel nous vivons. Ce n’est pas une exception... tous les systèmes ont agi de la même manière. Ce système a réussi à nous convaincre, du moins pour la plupart, qu’il était l’aboutissement ultime de l’Histoire et qu’un changement ne pouvait s’opérer qu’en son sein et seulement sur quelques aménagements. C’est cette conception qui fonde aujourd’hui toute l’action politique... et c’est cette conception qu’il est urgent de remettre en question.
Ce n’est pas nouveau de remettre en question des évidences. Remettre en question la méthode électorale aujourd’hui équivaut à ce qu’aurait été, et ce qu’a été, la remise en question du caractère divin du pouvoir durant l’Ancien Régime.
Rappelons que l’on a abandonné la Pierre philosophale quand s’est construite la physique moderne, autrement dit lorsque l’on a posé les problèmes d’une autre manière. Tous les progrès, que ce soit dans le domaine des sciences exactes, mais aussi dans celui de l’évolution sociale se sont fait en remettant en question les « évidences ».
Comment peut-on être sûr que l’on fait fausse route et que le changement social se place sur un autre terrain et lequel ?
L’Histoire répond, en partie, à cette délicate question :
les acquis ne sont jamais définitifs comme on aurait tendance à le croire en raisonnant à l’échelle de la vie humaine... la preuve, tous les acquis sociaux, fruits des luttes sociales, sont remis en question (protection sociale, retraites, contrats de travail, services publics,...)
un véritablement changement se fait lorsque un système nouveau prend le relais d’un système pourrissant,
la conscience se forme dans la pratique
Ce à quoi l’Histoire ne répond pas c’est la manière de s’y prendre, du moins dans le détail, et les échéances...
Si tout cela est exact on comprendra le caractère dérisoire de l’action politique actuelle, le gaspillage inouï d’énergie dans des querelles, des discussions et des débats qui sont complètement « à côté de la plaque », « hors sujet », totalement en décalage par rapports aux vrais questions et aux exigences du moment... « débat » qui n’est en fait qu’une opération médiatique de marketing politique.
Bien sûr, les « vieux alchimistes », les politiciens profiteurs, celles et ceux qui ont fait de cette recherche une profession, un faire valoir, un instrument de promotion sociale, perdant au passage de vue l’objectif, vont être réticents pour changer de méthode. Ils vont doctement nous expliquer, contre toute évidence et pour certains (pas tous) avec bonne foi, que c’est la « seule valable », qu’il « ne faut pas désespérer », qu’il « faut persévérer », que « c’est ça la démocratie » (sic).
Avant que nous puissions établir une rupture avec le système marchand, il va bien falloir que nous fassions un « rupture dans nos têtes », que nous pensions l’évolution sociale autrement.
Nous ne convaincrons pas qu’avec des mots, des discussions, de polémiques, des programmes et des promesses, aussi convaincants soyons nous. L’esprit du changement, l’idée de nouvelles relations sociales s’implantera dans les esprits, dans les consciences qu’à partir d’une pratique sociale concrète qui montrera que le monde que nous voulons est non seulement souhaitable mais aussi et surtout possible.
A défaut de cette problématique politique nous retomberons dans les vieilles ornières du passé... nous ne les avons d’ailleurs pas quittées. Nous ne nous en tiendrons qu’à des slogans, certes accrocheurs, mais purement incantatoires. Celles et ceux que nous voulons avec nous, continuerons, à défaut d’autre chose, à croire aux vieilles lunes électorales.
L’action politique telle qu’elle est conçue aujourd’hui, avec bien entendu l’approbation des tenants du système, n’est qu’une recherche de la Pierre philosophale qui capte toute notre énergie citoyenne, nous submerge d’espoir, mais est totalement stérile. Elle est l’élément central de la mystification spectaculaire de la politique et l’instrument de notre aliénation au système.
Le système marchand, de part son développement mondialisé, sa déliquescence sociétale, sa capacité à exclure massivement et l’atteinte irrémédiable à l’environnement qu’il impose à la planète, nous met au pied du mur.
Sans vouloir faire dans le pathétique, à moyen terme, il est possible que le dilemme soit : le changement ou la mort. A nous de choisir ! Mais attention, le temps presse... Nous n’avons plus le droit à l’erreur.
24 juin 2006 Patrick MIGNARD
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« VICTOIRE DE "LA" POLITIQUE... MORT "DU" POLITIQUE »
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